" Depuis quatre heures que je suis à cette table, je n'ai ni lu ni écrit. Enfoui dans un état d'ineffable bien-être, les yeux le plus souvent clos, j'ai erré en moi, soumis aux intermittences du murmure. Bien des choses auraient dû être notées, mais prendre mon stylo semblait au-dessus de mes forces. "
" J'étais dans une telle passivité que je ne pouvais déplacer ma main, et je savais d'expérience que le moindre mouvement aurait tout détruit. Aussi ai-je veillé à n' esquisser aucun geste, de crainte d'être arraché à ce dont je jouissais, et qui était si fragile, si précieux, si intense. "
" Dans l'état où je suis, la vie calmement ruisselle, m'inonde, m'emplit de confiance, de ferveur, accroît mon amour des êtres et ma foi en la vie. "
" La culpabilité, les impatiences, les tourments, les peurs ont disparu, et je ne suis plus que ce flux, cette paisible et inépuisable coulée qui me convainc que la vie est bonne, simple, formidablement riche."
" Coupé du temps, je n'ai pas conscience que les heures continuent de s'écouler, et quand j'émerge de cet état, revenir au quotidien n'est plus une épreuve. Auparavent, vous l'avez compris, c'en était une, et je la redoutais. Mais maintenant, le passage se fait sans à-coup. L'existence reprend normalement son cours, et tout devient soudain plus facile, plus attrayant, tout se charge d'un nouveau sens. "
Texte de Charles Juliet, extrait de son livre, Dans la lumière des saisons .